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Osez Joséphine © Bechu & Associés

Architecture : 4 tendances qui façonnent l’avenir

La densification des villes et l’urgence climatique poussent à revoir les modes de construction. La prise de conscience opère, la manière de concevoir les projets évolue. L’architecture de demain s’envisage engagée, plus responsable, plus durable. L’objectif : bâtir des villes respirables capables de faire face aux défis de notre époque. Tour d’horizon de 4 grandes tendances en architecture à la hausse qui se dessinent dès à présent.

2023 : anticiper les enjeux de demain

L’heure est à l’économie d’énergie et à la consommation, jusque-là, on ne vous apprend rien. L’industrie du bâtiment est en profonde mutation depuis plusieurs années. Toute la chaîne est en train de se réinventer afin de répondre à de nouveaux enjeux.

Répondre à l'urgence climatique

Mutation de l'industrie du bâtiment
Énergie renouvelable

L’urgence climatique, en ligne de mire, force le secteur à entamer des efforts considérables pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) dont il est responsable à près de 40 % dans le monde, et 25 % à l’échelle nationale. Pour lutter contre le changement climatique, l’objectif de neutralité carbone d’ici à l’horizon 2050 doit être atteint. Celui de la réduction de 50 % des émissions CO₂ également.

Par ailleurs, le dérèglement climatique entraîne des catastrophes naturelles sans précédent. Sécheresse, vagues de chaleur, inondations, tremblements de terre, tsunamis, incendies de forêt… Partout dans le monde, les phénomènes météorologiques extrêmes, liés au changement climatique, causent des dégâts considérables. L’actualité récente, avec les violents séismes qui ont frappé la Turquie à plusieurs reprises, en est la preuve.

Dans le dernier rapport du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), les auteurs mettaient déjà en alerte : « Le monde sera confronté à de multiples aléas climatiques inéluctables au cours des deux prochaines décennies avec un réchauffement planétaire de 1,5 °C. Le dépassement, même temporaire, d’un tel niveau de réchauffement entraînera des conséquences graves supplémentaires, dont certaines seront irréversibles. Les risques pour la société augmenteront, y compris pour l’infrastructure et les établissements humains sur les côtes de basse altitude ». Il paraît de sens que les grandes villes doivent impérativement anticiper et s’adapter à ces changements. D’autant plus que ces zones urbaines concentrent près de 4,4 milliards d’habitants. Selon les prévisions, cette proportion pourrait atteindre près de 70 % d’ici 2050.

Quelle architecture durable construire pour le futur ?

Dans ce contexte, le moment est donc venu de repenser les méthodes de construction, y compris les normes parasismiques, eu égard aux défis environnementaux. L’architecture durable constitue l’un des leviers pour lutter efficacement contre les aléas climatiques et s’adapter au changement. Mais alors, qu’entend-on derrière cette appellation ? Le concept de l’architecture durable, appelée aussi écologique ou verte, est loin d’être nouveau. Cette conscience est née aux États-Unis dans les années 1960. Son principe consiste à concilier performance et qualité du bâti, tout en préservant l’impact sur l’environnement. De cette notion, découlent de nombreuses approches : bioclimatique, décarbonée, biomimétique… Dans cette bataille sémantique, peu de différences, mais toutes répondent aux principes du développement durable.

Les principes de l'architecture écologique

L’architecture écologique repose sur plusieurs critères clés : l’optimisation des ressources naturelles, le réemploi des matériaux, la gestion et le recyclage des déchets, l’efficacité énergétique avec l’emploi de sources renouvelables, le respect de l’écosystème, le confort et la qualité de vie. En intégrant ces différents principes, l’architecture durable permet de construire des bâtiments moins polluants, moins énergivores et respectueux de l’environnement et de ses occupants.

Tendance 1 : l'architecture bioclimatique, l'efficacité énergétique

Dans l’Antiquité déjà, les romains avaient saisi l’importance de tirer parti des conditions climatiques et de l’environnement pour concevoir des habitations plus confortables et économes en énergie grâce à l’exposition solaire. Popularisé en 1963 par l’architecte hongrois Victor Olgyay dans son ouvrage Design with climate, le terme bioclimatique évoque un outil capable de diagnostiquer le climat en intégrant des données météorologiques dans les méthodes de construction. La discipline s’est ensuite développée dans les années 1970, après les deux chocs pétroliers de 1973 et 1979 et par conséquent, la hausse importante des ressources énergétiques. Les énergies fossiles, grand standard de l’époque, sont remises en question. Ils laissent place à de nouvelles pratiques et alternatives économiques.

Les premiers projets bioclimatiques voient le jour. Ce mode de conception repose sur la prise en compte du facteur climatique et de l’environnement à l’échelle locale. On parle alors d’étudier le microclimat, l’exposition et l’intensité du vent, ainsi que la zone géographique d’un site afin de maintenir un équilibre thermique et éviter les déperditions de chaleur. Les bâtiments construits sous cette approche profitent ainsi de tous les apports énergétiques. Par la même occasion, ils procurent des lieux plus sains et agréables à vivre pour leurs usagers. L’architecture bioclimatique s’inscrit ainsi dans une démarche de développement durable. Elle prône l’utilisation de matériaux durables et recyclables, voire biosourcés comme la laine de bois ou de chanvre, tous deux présentant de hautes qualités isolantes.

Exemples d'architecture bioclimatique en métropole lilloise

Programme immobilier Hope par Aventim
Hope © Aventim - © Vertex

La future cité administrative de Lille s’appuie sur des principes de conception low-tech et bioclimatiques. Totalement recouvert de panneaux solaires et intégrant 700 tonnes de matériaux biosourcés, le projet prévoit d’atteindre le niveau E3C1, soit l’un des plus exigeants en matière de performance énergétique sur le référentiel E+C-. Le bâtiment qui conjugue sobriété énergétique et qualité d’usage sera livré en fin d’année 2023.

Autre exemple vertueux, l’opération Écho – développée par Aventim et Aire Nouvelle –, au pied du Zénith et de Lille Grand Palais. Il repose sur une conception bioclimatique avec la mise en place de brise-soleil et d’ouvrants. À Villeneuve-d’Ascq, près du Stade Pierre Mauroy, les deux promoteurs développent conjointement un ensemble de bureaux de 17 000 m² répartis sur trois bâtiments, dont 10 000 m² en ossature bois et à partir de matériaux biosourcés. Baptisée Hope, l’opération est conçue selon les règles du bioclimatisme avec un système de climatisation à haute valeur environnementale. Sa livraison est prévue pour le dernier trimestre 2023.

Tendance 2 : l'architecture décarbonée, nouvelle économie des ressources

Voilà quelques années que les architectes s’engagent à déployer des projets durables en faveur de la transition écologique. La signature du pacte Lille Bas Carbone en juin 2021 par plus d’une centaine de professionnels traduit la volonté et l’engagement de promouvoir un nouvel art de concevoir dans le respect de l’environnement.

Dans cette cacophonie, une kyrielle de publications se succèdent à un rythme effréné, énonçant l’urgence d’atteindre les objectifs de réduction carbone dans une temporalité assez courte. Si ces derniers sont clairement définis par la RE2020, le décret tertiaire, ou encore la loi Climat et résilience, on peine encore à établir une feuille de route explicite pour y parvenir. Les données ne sont pas simples à maîtriser, les référentiels continuent de s’affiner au fil des années. Le label bas-carbone, par exemple, a été créé par le ministère de la Transition écologique en 2018, avec pour intention d’accompagner et d’inciter les porteurs de projets à atteindre la neutralité carbone. Il permet ainsi de certifier les réductions ou la séquestration de GES.

L’architecture décarbonée signifie donc de limiter au maximum les besoins énergétiques, par le biais de techniques comme la ventilation naturelle, le rafraîchissement passif, l’éclairage naturel. Elle implique principalement l’utilisation de sources d’énergie renouvelables, comme l’énergie solaire, éolienne, géothermique ou encore hydraulique, incluant une gestion intelligente permettant de réguler en fonction des besoins réels des usagers. Outre l’enveloppe performante, elle se concentre également sur une conception circulaire. Autrement dit, les bâtiments construits doivent tenir compte de leurs émissions tout au long de leur cycle de vie pour en optimiser l’impact à chaque étape. Bien sûr, une conception bas carbone repose sur l’utilisation de matériaux économes en ressources ou biosourcés et veillera au réemploi et au recyclage.

Quelques exemples sur le marché de l'architecture décarbonée

Opération Terre de Bassin à biganos
Terre de bassin © Quartus © Joly & Loiret

Aux quatre coins de la métropole, les chantiers en cours deviennent des terrains d’expérimentation en matière de construction bas carbone. C’est le cas de l’aménagement de l’écoquartier des Rives de la Haute Deûle, aux Bois-Blancs et à Lomme, dont deux bâtiments ont été labellisés BBC effinergie et BREEAM. Construire décarboné, c’est aussi privilégier des matériaux bas carbone comme le bois, le béton bas carbone ou encore la terre crue, une matière première écologique et saine, à très faible énergie grise, qui présente des qualités constructives en adéquation avec les enjeux environnementaux. Cette dernière permet notamment de réguler naturellement l’humidité en maintenant une température idéale de jour comme de nuit.

Le groupe Quartus, partenaire fondateur de la fabrique Cycle Terre depuis 2018, a fait le pari de la terre crue pour ses projets immobiliers. Ladite fabrique prévoit de recycler jusqu’à 10 000 tonnes de terre crue par an. Le promoteur s’est également engagé à intégrer, dès la conception de ses projets, des matériaux biosourcés, géosourcés ou issus du réemploi.

L’opération Terre de bassin à Biganos, en Nouvelle-Aquitaine, est un des premiers projets à voir le jour avec des briques extrudés de terre cuite.

Tendance 3 : l'architecture régénérative, entre frugalité et résilience

Osez Joséphine, architecture bioclimatique à Rueil-Malmaison
Osez Joséphine © Bechu & Associés

À l’instar de la construction décarbonée, l’architecture régénérative est une réponse à l’enjeu du changement climatique. Encore méconnu dans le paysage français, ce concept désigne toute construction réalisée qui génère un impact positif sur l’environnement, contribuant ainsi à son enrichissement. Cette approche innovante va au-delà de celle du développement durable. Une structure dite régénérative est ainsi capable de se renouveler et de reconstituer ses propres ressources en énergie et en matériaux pour les réemployer à l’infini. Il ne s’agit plus seulement d’utiliser le moins de ressources possible et de limiter l’impact environnemental, comme le fait la durabilité, mais de participer à l’amélioration de tout un écosystème.

Dans une logique d’économie circulaire, frugale et low-tech, l’architecture régénérative compose avec le vivant, réintègre l’écosystème dans ses flux et produit un impact net positif et prospère sur les milieux naturels. À titre d’illustration, un bâtiment régénératif peut, grâce à son enveloppe, séquestrer le gaz carbonique et épurer l’air. Autosuffisant en chauffage, il distribue la chaleur excédentaire pour alimenter des réseaux de proximité. Enfin, sa gestion du cycle de l’eau intégrée, via un système de phytoépuration, redistribue l’eau pour différents usages (activités agricoles, humaines…), crée des habitats pour la biodiversité, mais aussi réutilise les eaux grises pour la production d’énergie. Cependant, pour des raisons de coûts, de moyens mais surtout d’acculturation, peu de programmes arrivent à combiner toutes ces approches.

Living Building Challenge, le graal de la certification du bâti

Afin de pousser les entrepreneurs et architectes à innover durablement, l’International Living Future Institute a créé en 2006 le Living Building Challenge (LBC). Cette certification s’applique aux bâtiments qui génèrent des bénéfices sur l’environnement et ses communautés. Elle repose sur vingt mesures obligatoires organisées en sept domaines de performance : site, eau, énergie, santé, matériaux, équité et beauté.

Parmi les prérequis, le projet doit intégrer des espaces dédiés à l’agriculture urbaine, à la biodiversité, avoir une gestion autonome en eau et en énergie incluant le net zéro, intégrer les principes de la biophilie, créer des interactions entre les écosystèmes… Il s’agit de la norme la plus stricte et rigoureuse en termes de conception durable et écologique. Rassembler sur un seul et même site tous les prérequis est difficilement atteignable. D’autant que la certification se base uniquement sur la performance réelle et non des projections. De plus, les projets doivent être exploités depuis au moins douze mois avant d’être évalués.

Tendance 4 : l'architecture biomimétique, la nature inspire l'innovation

Les villes sont de plus en plus congestionnées, en proie aux effets du réchauffement climatique et de l’urbanisation galopante. En lien avec l’épuisement de nos ressources, une discipline émerge depuis quelques années sur la scène architecturale : le biomimétisme. Associée aux projets architecturaux, cette approche consiste à s’inspirer du vivant – ce fameux laboratoire de recherche et de développement vieux de 3,8 milliards d’années – pour concevoir et innover de manière durable. Véritable source d’inspiration inépuisable, la nature offre une palette infinie en termes de connaissances et de savoir-faire. Il ne s’agit plus d’en extraire ses richesses, mais de les étudier.

Dans le domaine de la construction, les stratégies bioinspirées peuvent servir à dessiner la structure d’un bâtiment. Par exemple, on peut imiter la forme d’un organisme vivant. Ou encore améliorer les performances d’un point de vue technique, cette fois-ci en mimant le fonctionnement d’un écosystème. Dans le monde, il existe quelques exemples notables, comme le théâtre de Singapour. Sa couverture en aluminium forme une carapace semblable à celle que l’on retrouve sur le durian, un fruit tropical. Grâce à sa fonction, elle permet de diminuer les apports en énergie et de limiter l’utilisation de l’éclairage artificiel. Ainsi, en imitant les formes, les fonctions et les processus biologiques des organismes, le biomimétisme pousse l’innovation un cran plus loin en explorant de nouveaux champs pour concevoir des architectures durables.

L'école de la nature donne le ton aux projets bio-inspirés

Projet écotone à Antibes
Écotone Antibes © Jean Nouvel - Oxo Architectes

En France, la discipline n’en est qu’à ses premiers balbutiements. Cependant, quelques projets ont déjà intégré les principes du biomimétisme dans leur conception. D’autres encore, plus audacieux, ont coché toutes les cases. C’est le cas du futur projet Écotone à Arcueil, développé par la Compagnie de Phalsbourg. À dominante tertiaire, l’immeuble écosystémique se veut comme une référence en matière de biomimétisme. Sur près de 82 000 m², ce vaisseau amiral puise son inspiration de la nature. Ses façades en verre, renforcées par une seconde peau végétale, feront office de barrière thermique et acoustique. Ici, les parois s’ouvriront en fonction de la météo, à la manière des écailles d’une pomme de pin, offrant une ventilation naturelle. L’ensemble sera soutenu en grande partie par une structure bois.

À l’entrée de la technopole Sophia-Antipolis, un projet baptisé, lui aussi, Écotone, ambitionne de devenir la pierre angulaire du biomimétisme du Sud. Imaginé par les architectes Jean Nouvel et Manal Rachdi (Oxo Architectes), ce futur campus écologique abritera, sur cinq hectares, près de 40 000 m² d’activités tertiaires, hôtellerie et autres services, tout en faisant la part belle à la biodiversité. À Arcueil comme à Antibes, ces deux prouesses, conçues dans une logique biophilique qui vise à renforcer le lien avec la nature, contribueront au bien-être des usagers.

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